Activer les notifications OK Non

Il a été tué par un Israélien d’extrême-droite le 4 novembre 1995

L’assassinat d’Yitzhak Rabin, un tournant tragique pour la paix au Moyen-Orient

Le 4 novembre 1995, Yitzhak Rabin était assassiné par un Israélien juif d’extrême-droite à Tel-Aviv. Deux ans plus tôt, le Premier ministre travailliste avait lancé le processus de paix avec le leader palestinien Yasser Arafat. Trente ans plus tard, le rêve d'une paix durable avec les Palestiniens paraît plus que jamais lointain. Trente ans après, l’héritage de Rabin – un général devenu colombe de la paix – invite à la réflexion : dans un Moyen-Orient toujours en proie aux conflits, ses mots sur le risque pour la paix résonnent plus que jamais.

Par Marie Dolores Prost

Publié le 4 novembre 2025

L’assassinat d’Yitzhak Rabin, un tournant tragique pour la paix au Moyen-Orient

L’image avait fait le tour du monde et relançait l’espoir d'une possible paix.

Il y a exactement trente ans, le 4 novembre 1995, un coup de feu retentissait dans la nuit de Tel Aviv, changeant à jamais le cours de l’histoire israélienne. Yitzhak Rabin, Premier ministre d’Israël et artisan des accords d’Oslo, était abattu par un extrémiste de droite à l’issue d’un rassemblement pour la paix. Cet assassinat, survenu au cœur d’une période d’espoir fragile, a non seulement plongé le pays dans le deuil, mais a aussi marqué la fin d’une ère de négociations avec les Palestiniens. 

L’image fait le tour du monde et relance l’espoir d’une possible paix après déjà plus de quatre décennies de violences et de guerres. Le 13 septembre 1993 à Washington, le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin serre la main du leader palestinien Yasser Arafat sous les auspices du président américain de l’époque, Bill Clinton. Après neuf mois de négociations secrètes en Norvège, sous l’égide des États-Unis, sont signés les accords d’Oslo.

Ils définissent les premières étapes d’un processus d’autonomie des Palestiniens et d’un retrait progressif de l’armée israélienne des Territoires palestiniens conquis en 1967. Israël reconnaît l’OLP et Yasser Arafat reconnaît l’État d’Israël et renonce à la lutte armée.

Violentes manifestations contre Rabin

Pour les partisans de la paix, c’était un pas historique vers la coexistence. Mais pour les conservateurs religieux et les nationalistes, ces concessions étaient une trahison. Des rabbins radicaux avaient même invoqué le “din rodef”, un principe de la loi juive autorisant à tuer quelqu’un perçu comme une menace pour la vie juive. 

Les manifestations contre Rabin étaient violentes : des effigies du Premier ministre en uniforme SS, des slogans comme “Rabin est un traître” ou “Mort à Rabin”

Benjamin Netanyahu, alors leader de l’opposition du Likud, avait participé à des cortèges où l’on simulait des funérailles avec un cercueil et une corde. Malgré des avertissements des services de sécurité sur des complots potentiels, Rabin refusait de porter un gilet pare-balles, qualifiant ces menaces de “chutzpah” une impudence. 

Le 4 novembre 1995, le premier ministre israélien Yitzhak Rabin était assassiné au cœur de Tel-Aviv

Le 4 novembre 1995, le premier ministre israélien, Yitzhak Rabin, était assassiné au cœur de Tel-Aviv à la fin d’un rassemblement pour la paix devant des milliers de personnes.

Ce jour-là, plus de 100 000 personnes s’étaient rassemblées sur la place des Rois d’Israël (aujourd’hui place Rabin) pour un meeting contre la violence et en soutien aux accords de paix. Yitzhak Rabin avait déclaré : “J’ai toujours cru que la plupart des gens veulent la paix et sont prêts à prendre des risques pour elle.”  

À 21h30, alors qu’il descendait les marches de l’hôtel de ville pour rejoindre sa voiture, un jeune homme de 25 ans, Yigal Amir, s’approcha par-derrière et tira trois coups de feu avec un pistolet Beretta. Deux balles atteignirent Rabin à l’abdomen et à la poitrine, la troisième blessa légèrement un garde du corps.

Amir, un étudiant en droit ultra-orthodoxe opposé aux retraits territoriaux, justifia son acte par le “din rodef”, affirmant qu’il n’agissait pas pour arrêter le processus de paix qu’il qualifiait de “processus de guerre” mais par obligation religieuse.  Submergé par les gardes, il fut arrêté sur place.

Rabin, transporté d’urgence à l’hôpital Ichilov, succomba à ses blessures à 23h02, après une heure et demie de lutte des médecins. Dans sa poche, on trouva une feuille tachée de sang avec les paroles de “Shir LaShalom” (“Chanson pour la paix”), entonnée lors du rallye.

Onde de choc

À 23h15, Eitan Haber, chef de cabinet de Rabin, annonça la nouvelle à une nation stupéfaite : “Le gouvernement d’Israël annonce avec consternation, grande tristesse et profond chagrin la mort du Premier ministre et ministre de la Défense Yitzhak Rabin, assassiné par un meurtrier ce soir à Tel Aviv.”  Shimon Peres prit par inter les rênes du pays.

Les funérailles, le 6 novembre au mont Herzl, réunirent des dizaines de dirigeants mondiaux, dont Bill Clinton qui lança son célèbre “Shalom, haver” (“Au revoir, ami”). Amir fut condamné à la perpétuité, son frère Hagai à 16 ans pour complicité. 

Un legs durable, trente ans plus tard

L’assassinat de Rabin a creusé un fossé entre la gauche laïque et la droite religieuse, symbolisant un “kulturkampf” culturel et politique.  Le processus de paix s’est effondré, et certains analystes le considèrent comme l’assassinat politique le plus “réussi” de l’histoire moderne, ayant stoppé net les concessions territoriales. 

Aujourd’hui, en cette date anniversaire, des commémorations ont eu lieu à travers Israël. À Tel Aviv, environ 150 000 personnes se sont rassemblées pour un rallye mêlant deuil et protestation contre la polarisation actuelle. Des tensions ont éclaté à la Knesset lors d’une session spéciale, reflétant les divisions persistantes. Des enregistrements audio récents du chef d’état-major de l’époque rappellent les avertissements ignorés. 

Trente ans après, l’héritage de Rabin – un général devenu colombe de la paix – invite à la réflexion : dans un Moyen-Orient toujours en proie aux conflits, ses mots sur le risque pour la paix résonnent plus que jamais.

M. D. P.

La rédaction vous conseille

Envie de lire tous les articles ?

Débloquez immédiatement tous les articles. Sans engagement.

Abonnement

Débloquez immédiatement tous les articles.

Je m'abonne

Newsletter

Recevez chaque semaine les titres à la Une

Inscrivez-vous